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Analyses 23 mai 2024

Changements clés dans l’attribution gratuite d’actions depuis décembre 2023 – Thibaud Forbin

Par Thibaud Forbin, associé, Chaintrier Avocats

 

Le 30 novembre 2023 a été publiée la loi n°2023-1107 portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise.

L’article 17 de la loi n°2023-1107 réforme le régime d’attribution gratuite d’actions en modifiant l’article L. 225-197-1 du Code de commerce. Ces modifications permettent d’étendre l’utilisation des actions gratuites en réhaussant les seuils généraux d’attribution et en permettant aux sociétés non cotées d’attribuer des actions gratuites aux salariés et à certains mandataires sociaux de leurs filiales. Il précise en outre les règles concernant le calcul du plafond individuel d’attribution.

En l’absence de précisions, la nouvelle rédaction de l’article L. 225-197-1 du Code de commerce est entrée en vigueur au lendemain de sa publication au journal officiel. En conséquence, cet article s’applique à toute décision d’attribution gratuite d’actions prise depuis le 1er décembre 2023.

Modification des seuils généraux d’attribution gratuite d’actions

L’assemblée générale extraordinaire des sociétés par actions (la collectivité des associés des sociétés par actions simplifiées) fixe le pourcentage maximal du capital social pouvant être attribué, sur décision de l’organe de direction de ces sociétés, sous forme d’actions gratuites existantes ou à émettre au profit [1]: des membres du personnel salarié de la société ou de certaines catégories d’entre eux ; et du président du conseil d’administration, du directeur général, des directeurs généraux délégués, des membres du directoire ou du gérant d’une société par actions.

Principe

Avant la promulgation de la nouvelle loi, l’organe de direction de la société émettrice, agissant sur autorisation donnée par l’assemblée générale extraordinaire ou la collectivité des associés, ne pouvait pas émettre et attribuer gratuitement un nombre d’actions représentant plus de 10% du capital social à la date de sa décision. Ce pourcentage maximal a été réhaussé de 5% et passe donc à 15 %[2] .

Cas des PME

Ce seuil général est également réhaussé de 5% et passe de 15% à 20% pour les PME [3]. Toutefois les autres conditions d’application de ce seuil spécifique n’ont pas été modifiées : le seuil ne s’applique qu’à l’attribution gratuite d’actions au profit de salariés de la société uniquement et pas de mandataires sociaux et il doit être prévu dans les statuts. Le texte n’interdit pas aux statuts de prévoir un pourcentage maximal intermédiaire (18% par exemple).

Pour le calcul de ces seuils généraux, ne sont pas prises en compte les actions gratuites déjà attribuées qui n’ont pas été définitivement acquises au terme de la période d’acquisition ainsi que les actions qui ne sont plus soumises à obligation de conservation.

Les attributions gratuites d’actions dites « démocratiques »

L’article L. 225-197-1, I, alinéa 3 du Code de commerce est sensiblement modifié.

Auparavant, les pourcentages prévus à l’alinéa 2 pouvaient être portés à 30% si l’attribution gratuite d’actions profitait à tous les salariés de la société. Ce pourcentage maximal est désormais de 40%.

La loi prévoit un cas d’attribution gratuite d’actions supplémentaire.

Le pourcentage maximal est de 30% lorsque l’attribution bénéficie à des salariés représentant au moins : 25% des salaires bruts pris en compte pour l’assiette des cotisations de sécurité sociale et versés lors du dernier exercice social ; et 50% du personnel salarié de la société émettrice.

Ces deux plafonds de 30% et 40% ne sont applicables que si, au-delà du pourcentage de 15 % ou de 20 %, l’écart entre le nombre d’actions distribuées à chaque salarié n’est pas supérieur à un rapport d’un à cinq.

En cas d’attribution à des mandataires sociaux de la société émettrice, leurs rémunérations et leur nombre sont pris en compte pour la détermination des seuils relatifs au total de salaires bruts et aux effectifs.

Harmonisation des règles concernant les groupes de sociétés cotées et non cotées

Avant cette réforme, seuls les groupes cotés avaient la possibilité de réaliser des attributions gratuites d’actions au profit de salariés ou de certains mandataires sociaux de sociétés liées à l’émettrice. La loi introduit un alinéa offrant cette possibilité aux groupes non cotés, harmonisant ainsi les deux régimes.

Précision des règles concernant le plafond individuel

Aucune action gratuite ne peut être attribuée à un salarié ou à un mandataire social détenant déjà plus de 10 % du capital. En outre, une attribution gratuite d’actions ne doit pas non plus avoir pour effet de faire franchir à un salarié ou à un mandataire ce seuil de détention.

La loi nouvelle exclut les titres de la société détenus directement depuis plus de sept ans par l’attributaire concerné pour le calcul de ce plafond. L’effet de cette disposition sera double en pratique. Il en découle d’abord une possibilité de rechargement du plafond individuel au-delà de sept ans de détention. Elle permet en outre de clarifier le mode de détention des titres pour le calcul du plafond individuel en précisant que seuls les titres détenus directement par l’attributaire doivent être pris en compte. Avant la loi nouvelle, la question de la prise en compte des titres détenus indirectement par l’attributaire par l’intermédiaire d’une holding personnelle était controversée.

Cette précision ne nous semble pas exclure les risques d’abus de droit. Il faudra donc rester vigilant dans les conditions de création d’une holding individuelle pour éviter que l’administration fiscale considère que la création de cette holding a eu pour motif « principal » d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales de l’intéressé en contournant les règles relatives au calcul du plafond individuel permettant d’exclure les titres détenus par la holding (procédure dite de « mini-abus » de droit, L 64 A du LPF instaurée par la loi n°2018-1317 du 28 décembre 2018, article 109). Même si le risque d’abus ne pourra jamais être totalement exclu, il faudra par exemple éviter qu’un attributaire apporte ses titres à une holding juste avant l’attribution gratuite d’actions à son profit et justifier en tout état de cause la création de la holding par d’autres motifs (réorganisation patrimoniale par exemple).

La loi utilise le mot « titres » et non pas « actions ». Selon l’ANSA, il en résulte que le seuil individuel doit être calculé en tenant compte des valeurs complexes ayant une composante d’action existante (Actualités ANSA du 4 décembre 2023). La loi nouvelle ne précise pas si les valeurs mobilières donnant accès au capital doivent être prises en compte. Dès lors, il convient de se référer à la définition des titres financiers donnée par l’article L. 211-1 du Code monétaire et financier. Les valeurs mobilières donnant accès au capital (obligations convertibles en actions, bons de souscription d’actions, BSPCE…) répondant à cette définition, elles devraient être prises en compte dans le calcul du plafond individuel.

 

Pour retrouver le texte de loi 👉🏼 https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000048480565

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